Avouons-le : il y a des choses qu’on n’attend pas de voir dans une vie. Un hippopotame qui fait du ski de fond, un responsable de la SAAQ honnête… ou un mosh pit dans un concert de musique pop. Et pourtant, depuis quelque temps, voilà que des foules parfumées au déodorant vanille-concombre essaient d’imiter ce rituel sacré du metal. Le résultat ? Imaginez une partie de hockey… mais sans rondelle, sans mise en échec, et avec des joueurs qui s’excusent à chaque contact. Voilà à quoi ressemble un mosh pit de pop. Des gens qui se poussent comme si on jouait au Twister debout, avec la conviction d’un coussin en velours. Il y a des choses qui vont bien ensemble dans la vie : le beurre de pinotte et le pain, la bière et la bédaine, le mosh pit et le metal. Cette dernière est née d’une union… naturelle, forgée dans la sueur, le bruit et parfois un bleu ou deux. Mais voilà que depuis un bout, dans les concerts pop, on voit apparaître un drôle de phénomène : l’appropriation du mosh pit et du fameux « wall of death ».
Il fallait bien que ça arrive. J’ai des amis qui étaient à Osheaga et qui me racontaient que « tel artiste » plutôt pop avait demandé un wall of death. Au FEQ, lors du concert de KYGO, les gens faisaient des mosh pits mais de façon plutôt maladroite, selon plusieurs. Lorsque j’étais au concert de Slayer au FEQ, un contingent de la foule a voulu « faire des mosh pits ». J’étais dans la section dites « Privilège » mais il y avait tout de même des habitués des concerts metal. Les werreux qui vont tout voir lors du festival et qui improvisent une fois là-bas ont gouté à la médecine des habitués des vrais mosh pits. J’ai vu une couple de chandails polos à l’effigie du bureau X se ramasser cul par-dessus tête, après avoir tenté la valse toxique près des habitués.
If you hit the floor, you can always crawl… vers ta mère!
Après avoir emprunté nos vestes à studs, nos riffs, le fait de porter des t-shirts metal au nom du style et même nos horns (en mode selfie), la pop a décidé de s’approprier… le mosh pit et le wall of death. Le problème, c’est qu’un mosh pit dans un show pop ressemble moins à une explosion de fureur rageuse qu’à un atelier de recette où tout le monde a oublié ses cuillères à mesurer. Ça se bouscule timidement, ça rit nerveusement, et au final ça donne davantage l’impression d’un jeu de chaise musicale… mais avec pas de chaise! Soyons clairs: un mur de la mort au milieu d’un show de DJ Snake, c’est comme mettre du ketchup Heinz sur un excellent filet mignon.
Ça ne fitte pas.
Le mosh pit, c’est une énergie brute, une tradition guerrière du metal où les corps se rencontrent, se heurtent et se relèvent avec le plus grand respect. Dans la pop, ce qui devrait être un raz-de-marée devient souvent une chorégraphie maladroite, un genre de zumba improvisée où les spectateurs hésitent entre se faire un câlin ou faire semblant de se rentrer dedans.
Good friendly violent fun… mais pas en magasin pour tout le monde!
Et le fameux wall of death ? Dans le metal, c’est une scène apocalyptique, un choc de titans, le big bang sous stéroïdes par du monde un peu chaudaille, bien souvent. Dans la pop, le tout a des airs de deux files de clients chez Starbucks qui se croisent par erreur et qui finissent par se dire : « Oups, pardon, désolé ! ». On s’attend au chaos, mais le tout a des airs de gens qui s’entassent dans l’autobus pendant l’heure de pointe du matin..
Dans un festival metal, c’est une mer qui s’ouvre, la collision des mondes, la catharsis pure! Pour un concert pop? Ça ressemble à deux hordes de scouts et guides qui courent l’une vers l’autre… pour finir par rattacher le foulard de l’autre.
On a envie d’applaudir l’effort, mais c’est raté en cibole!
Que la pop veuille pimenter ses shows, d’accord. Mais vouloir se « faire metal » en organisant un mosh pit, c’est comme servir du tofu aux piments en prétendant que c’est un steak saignant : vue de loin, l’illusion est plutôt brève, et les connaisseurs voient tout de suite l’immense supercherie!
Soyons clairs : on n’empêche pas la pop d’expérimenter. Pantoute! Mais quand la pop tente de se faire metal, c’est comme si un troupeau de licornes essayait de charger une lignée de tanks. C’est coloré, c’est plutôt mignon et choupinou… mais ça n’impressionne personne. La vérité, c’est que la pop peut bien tout emprunter, elle ne deviendra jamais metal. Parce que le metal, ce n’est pas juste une gimmick. C’est une culture, un langage du chaos, une communion dans le bruit et la fureur. Et franchement, voir un wall of death sur du Sophie Powers… c’est comme voir des piranhas en train de tricoter.
And slam you partner against the wall… avec de la peinture encore fraîche
Qu’on se comprenne : personne n’empêche la pop d’inventer ses propres codes. Mais le metal, lui, a cultivé ces rituels avec une intensité et une authenticité que la pop ne pourra jamais copier sans se ridiculiser un peu. Car non, ce n’est pas parce qu’on a mis un riff un brin intense derrière un refrain qu’on est soudainement devenu Slayer et que ton public peu imiter celui de la bande à Araya.
Le metal, c’est sale, c’est lourd mais c’est du sérieux. La pop, elle, c’est du brillant, des moments chorégraphiés, du grand public. Ajouter un mosh pit là-dedans, c’est comme mettre Elsa avec une chainsaw dans un spectacle de Disney On Ice. Ça attire l’œil, mais personne n’y croit vraiment. Alors oui, la pop peut bien emprunter nos horns, nos mosh pits et nos walls of death, mais il faut qu’elle sache que dans l’intensité de l’arène du metal, ça ne pardonne pas.
La pop fait du divertissement. Le metal, lui, fait trembler la terre et les fondations. Et ça, aucune piste pré-enregistrée ne peut l’imiter. Alors la prochaine fois qu’on verra une vedette de la pop lancer un « Allez, je veux voir un wall of death, come on ! », rappelons-nous que le seul truc qu’elle risque vraiment de détruire, ce sont des faux cils et des chemises de chez UNIQLO!
*Vos have ut habere bonum risu semel in a dum