Depuis que je roule en véhicule électrique, j’ai compris une chose : l’avenir, ce n’est pas un concept, c’est une prise murale. Dans mon cas, c’est plutôt le truc qui se fixe sur ma maison, la borne électrique. Fini les beaux dollars qui s’évaporent à la pompe du Esso comme une tournée de Six Feet Under qui fait trois villes et se termine, faute de bidou. Maintenant, j’arrive au boulot avec ma Toyota BZ4X rechargée et le sourire d’un métalleux qui a trouvé un vinyle original de Altars of Madness de Morbid Angel pour 20 piastres dans une vente de garage à Terrebonne. Plus d’argent pour les vinyles, la bière et la table de merch.

Maintenant, je visite les postes d’essence pour y acheter du lait (au Couche-Tard, c’est là que c’est le moins cher), faire vérifier mes billets de loto ou acheter de la bière quand Espace Houblon ou les supermarchés sont fermés. Par contre, j’ai toujours mon ancien véhicule à essence, qui est encore plein d’essence, pratiquement. Je l’utilise, une fois semaine environ car ça me manque de chauffer à clutch et je dois l’avouer, j’aime encore l’odeur du gaz. 

Ma flamboyante Yaris rouge, c’est un tank! Aucun doute là-dessus. J’espère que mon nouveau bolide sera aussi solide. En passant, ma Yaris est en vente. Pas annoncée mais elle l’est!

Par contre, un truc qui est annoncé, c’est la nouveauté de Revocation qu’est New Gods, New Masters et disons-le franchement, c’est gros comme une batterie de 72 kWh. Dave Davidson reste le guitariste-professeur-sorcier que l’on connaît, et il n’a pas besoin de gazoline pour alimenter ses riffs. Ses idées tournent en boucle comme un moteur à aimants permanents, ce qui nous donne zéro perte. Et tout ça, en efficacité!

Je n’ai jamais vraiment embarqué totalement dans les albums du groupe, la haute voltige finissait toujours par me lasser. Je suis plus un amateur de puissance, pas des acrobaties mais avec ce nouvel album, je crois que la balance se veut intéressante entre la technicité et la livraison en intensité métallique.   

Prenons la pièce titre. Ouverture d’album qui sonne comme une accélération silencieuse, mais brutale. On passe de 0 à 100 km/h, sans avertir. Tu pèses sur la suce, ça te colle au siège, et Davidson sort ses solos comme si Tesla avait embauché Marty Friedman pour designer ses tableaux de bord! Ensuite, Despiritualized déploie une atmosphère beaucoup plus sombre, avec une touche jazzy. C’est comme le moment où tu roules de nuit, avec tes phares, mais avec un riff technique dans les oreilles qui t’empêche de cligner des yeux.

The All Seing, c’est du chaos instrumental organisé, la pièce où Davidson montre qu’il peut prendre un simple motif musical et le transformer en un labyrinthe mathématique. Ici, c’est l’équivalent metal du freinage régénératif sur une voiture électrique : plus ça cogne, plus ça recharge! Invité plutôt surprenant qu’est le guitariste de jazz Gilad Hekselman qui démontre ses prouesses sur ce morceau.

Aussi, Confines of Infinity (avec Travis Ryan de Cattle Decapitation) c’est carrément un appel à l’intensité. C’est gras et envenimé, comme nous devons nous y attendre. L’album se ferme avec Buried Epoch, une pièce bien lourdaude en death metal qui propose même la voix de Luc Lemay de Gorguts et vers le dernier virage, ça accélère en tit-pépère!

Le message qui est passé sur New Gods, New Masters? On fait table rase, on remet le compteur à zéro. Les vieux dieux (donc les idoles mortes, les systèmes épuisés, l’essence, les énergies fossiles) sortent de notre milieu et nos habitudes, et de nouvelles forces prennent le contrôle. Exactement comme mon passage du char à essence au char électrique : fini les vieilles divinités pétrolières pour activer ma minoune rouge, place aux nouveaux maîtres des énergies.

Quoiqu’il y ait encore des zones grises, très grises…

Tout l’album transpire cette dualité : brutalité contre intelligence, chaos contre contrôle et technicité contre martèlement métallique. Davidson ne compose pas, il sculpte sa musique comme un ingénieur programme la distribution d’énergie d’une batterie. Et si certains groupes thrash vieillissent comme une Civic 2001 (y’en a encore beaucoup à Chicoutimi) avec son compteur à 400 000 km, Revocation, eux, avancent comme un modèle tout neuf : futuriste, stable, et encore plein de… kilowatts!

Alors, soyons clairs. Même si je suis aussi heureux de ma BZ4X que du nouvel album de Revocation, il reste que la conduite de mon vieux bolide rouge me manque amplement, comme mon amour pour le metal plus Cro-Magnon. Et pour un métalleux, mettre sur le même piédestal une bagnole comme la mienne et un disque de Revocation, ça veut dire une chose : on est dans le haut de gamme, dans le solide, dans le riff certifié… sans émissions polluantes!

Disponible sur Metal Blade Records.

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Photo : Alex Morgan