De mémoire, je crois que le dernier concert que j’ai couvert au niveau des textes était celui de Ghost en 2022. C’était lors du retour à la normale après la pandémie et par la suite, j’ai laissé le soin de la couverture des concerts au reste des membres de l’équipe d’ArsMediaQc de l’époque. Je me contentais tout simplement d’assister aux concerts, sans avoir à me soucier de devoir taper un texte le lendemain matin. Oui, le lendemain matin ou du moins le lendemain tout court car malgré cet acte de bénévolat, je me dois de rester professionnel et livrer un texte dans un délai raisonnable.

Publier un retour sur un concert une semaine après, comme dirait Dany Dubé, tu as perdu le momentum. Mes textes sont toujours prêts le lendemain, la seule chose qui puisse retarder leur parution demeure la livraison des photos de la part de le ou la photographe. Tu es un pro ou tu ne l’es pas, du moins dans le domaine de l’écriture métallifère. Donc, pourquoi reprendre le clavier pour couvrir un évènement? Cela me manquait? Pas du tout.

C’est parce que la soirée était à guichet fermé et je voulais absolument y aller. Je m’y suis pris sur le tard pour l’achat d’un billet donc je me suis retrouvé dans mes vieilles bottines à demander les accréditations officielles pour pouvoir couvrir ce concert d’Insomnium avec leur alter égo d’Omnium Gatherum et cette troupe de nouveaux venus qu’est Wilderun.

J’avoue que j’avais vraiment besoin d’une soirée de death metal au caramel. En toute honnêteté, c’est surtout Omnium Gatherum qui me plaisait. En ce qui concerne Insomnium, je n’ai jamais vraiment accroché sauf depuis leur dernier album, le succulent Anno 1696 qui m’a totalement séduit en 2023, y allant même avec un achat en vinyle.

C’est sous la flotte que je me suis rendu au Théâtre Corona, rebaptisé Beanfield, mais juste avant, je suis allé casser la croûte. J’ai bien tenté de me rendre jusqu’au Siboire, à environ 15 minutes de marche de la salle de spectacle mais la pluie avait réussi à transpercer ma veste « supposément » imperméable.

Soit qu’il pleuvait en ciboire, soit que mon manteau ne vaut plus de la marde!

Finalement, je me suis ramassé au McDonald’s à déguster un trio Big Mac qui se voulait convenable. Ensuite, il me restait une quarantaine de minutes à tuer et je me suis rendu au Burgundy Lion, le temps de me siffler une pinte d’IPA parce qu’après tout, c’était vendredi.

Et la semaine a été difficile. Pour bien des gens. Il y a eu l’éclipse, ceci demeure un fait indéniable mais à chaque personne que je croisais au concert et que nous prenions le temps de jaser, tous me disaient : « Chu tellement fatigué, man! » Phénomène commun, jasette lors d’une activité commune…

Je suis entré pile pour voir et entendre Wilderun. Je me souvenais d’avoir reçu la copie promotionnelle pour l’album Epigone et je l’avais mise dans la pile de type « On verra bien » que je me garde sur mon ordinateur. En écoutant les trois premières chansons, je me disais que Century Media venait tout juste de se signer une formation américaine en se disant qu’ils avaient besoin d’avoir leur Opeth à eux, dans un sens.

C’est devant un public réceptif que Wilderun a pu s’exécuter. Un public poli, qui a offert un accueil plus que chaleureux aux musiciens de Boston qui n’ont jamais fait mention de leur lieu d’origine, probablement au courant de la rivalité de nos deux clubs de hockey. De mon côté, ayant boudé leur album précédent, c’est donc les deux bras croisés, l’œil vif et les oreilles bien béantes que je me suis en mode ouverture face à la musique progressive/folky/death de Wilderun.

Comme je m’y attendais, ce sont les comparaisons avec Opeth qui me venaient en tête mais avec l’approche claire de la voix d’Evan Anderson Berry, j’avais aussi Haken en comparatif. Leurs chansons se veulent longues, contemplatives et c’est lorsque le groupe se veut plus charnu que je pouvais en apprécier la prestance. En mode plus folk/prog, la parcelle irritante se voulait la voix, qui se veut trop pimpante et gaillarde, me donnant l’impression d’assister à une comédie musicale de Lord of the Rings plutôt qu’à une procession métallique.

Par contre, les amateurs autour de moi se voulaient beaucoup plus absorbés face à la sonorité de Wilderun, ce qui me confirmait que ce groupe n’était tout simplement pas dans mes cordes métalliques. Lorsque ce phénomène arrive lors d’un concert, je me fixe un point à focaliser et je m’y attarde avec une certaine insistance. Pour compléter le tour de chant de Wilderun, je me suis mis à fixer le batteur dans ses moindres faits et gestes, jusqu’à ce que je sois totalement déstabilisé par l’irruption soudaine du technicien de scène Steven Henry qui est venu insérer un dildo rose à l’effigie de la Tour Eiffel, sur la pointe du hi-hat du batteur.

Je dois avouer qu’après le fou rire, j’ai changé mon focus, préférant y aller avec une analyse face au rituel sur la basse.

J’ai découvert Omnium Gatherum avec l’album The Burning Cold, en 2018. J’ai été totalement charmé par la sonorité du groupe, la précision des musiciens, les leads de guitare surfins et la voix de Jukka Pelkonnen qui se veut puissante mais excessivement audible. Dans le domaine du death metal mélodique, ceci demeure un tour de force d’y arriver.

Ensuite, je me suis mis à fouiller le catalogue en rétrogradant vers les origines du groupe et j’ai même eu la chance de voir Omnium Gatherum au plus que riquiqui Ritz PDB, en mars 2022. Moment plus qu’intense mais maintenant, je retrouvais le groupe sur une scène plus imposante, celle du Beanfield.  

Étant donné qu’Omnium Gatherum est l’un des groupes du guitariste Markus Vanhala (qui joue avec Insomnium depuis 2011), je me doutais bien que les amateurs avaient probablement eu, eux aussi, le même réflexe en allant visiter les projets du prodige. C’est ce qui confirme l’accueil face à Omnium Gatherum qui jouit d’une place enviable sur cette tournée qui se méritait l’inscription Omnium Insomnium (ou Insomnium Gatherum?) sur le t-shirt des fans qui ont acheté le forfait VIP.

En mettant le pied sur scène avec un enthousiasme débordant, on se rendait compte que l’énergie déployée par la foule alimentait la fougue des musiciens et ceci se voulait nécessaire pour Vanhala et aussi pour le guitariste Nick Cordle car les deux guitaristes montent sur scène avec Insomnium, par la suite!

Moi qui disais que les gens rencontrés en soirée se disaient fatigués, en voici deux qui pourraient dire la même chose.

C’est avec la pièce Slasher que les Finlandais et l’Américain ont entamé la soirée et ce, avec brio. Cordle et Vanhala interchangent de position, question que tous les amateurs de voltige de la 6 cordes puissent voir leurs nombreuses prouesses. Pendant ce temps, le claviériste Aapo Koivisto en profite pour prendre quelques images avec son cellulaire entre deux tempos.

L’intensité et la bonne humeur sont au rendez-vous. Ceci me fait un grand bien, surtout que deux chansons provenant de The Burning Cold sont offertes avec Planet Scale et Gods Go First. Étrangement, c’est pendant la pièce la plus moelleuse du lot, en occurrence White Palace, que la foule a été plus intense au niveau des surfeurs sur la foule.

Il y a une belle fusion des voix d’accompagnement sur certaines chansons comme Paragon et New Dynamic, c’est très précis et le tout est d’un naturel déstabilisant. Aux percussions, Atte Pesonen (qui ressemble étrangement au serveur qui m’a servi ma pinte au Burgundy Lion) ne semble aucunement forcer sur son kit, moustache touffue bien au vent. Après avoir remercié à profusion la foule montréalaise entre chaque chanson, Jukka a invité les féroces férus d’OG à venir rencontrer le 2/3 du groupe à la table de merch, un peu plus tard dans la soirée.

Le public d’Insomnium est surtout composé de power métalleux qui ont désiré s’offrir un truc plus rugueux dans les oreilles. Hier soir, je voyais de nombreux gars dans la trentaine (probablement responsable du service à la clientèle dans une grosse entreprise ou assistant-comptable dans une firme) qui ont sûrement marié leur amoureuse du secondaire lors d’une cérémonie médiévale.

Avec un portefeuille bien garni, nous avons vu le comptoir d’Insomnium se faire vider de tout les hoodies aux couleurs sombres du groupe par des passionnés de cette troupe finlandaise. Ayant eu accès à la planification de la soirée au niveau du chronomètre, je savais qu’Insomnium allait nous offrir une soirée de 70 minutes mais mon inquiétude était au niveau des chansons offertes, étant donné ma préférence face au dernier album du groupe.

Fort heureusement pour moi, ce sont six chansons d’Anno 1696 qui se sont retrouvées sur la liste officielle de la soirée. Celle qui a ouverte la soirée se voulait 1696 et c’est à ce moment que certains ont comme compris que Vanhala et Cordle étaient membres de deux formations. Pour Vanhala, c’était une évidence mais quelques personnes autour de moi (qui ne suivent probablement pas les stats de metal autant que les bollos que nous sommes) se voulaient étonnés.

Pour Cordle, il était le choix évident étant donné que le guitariste Jani Liimatainen ait décidé de quitter le groupe à quelques semaines de la tournée. Déjà avec Omnium Gatherum et possédant une feuille de route plutôt imposante en tant que musicien de tournée, de l’avoir avec Insomnium ne pouvait qu’être bénéfique et surtout, logique.

Comme quatuor, ce groupe assure. Personnellement, je ne crois même pas nécessaire d’ajouter les petites subtilités sonores au niveau des arrangements lorsqu’Insomnium est sur scène. Leur death metal mélodieux est divin sur des chansons comme Ephemeral et And Bells They Toll.

Le point central du groupe demeure le bassiste et chanteur Niilo Sevänen. Ce dernier ne s’est pas gêné pour souligner la rivalité entre Montréal et Boston, la ville visitée la veille. De plus, il n’a cessé de vanter que Montréal était la capitale du metal en Amérique du Nord, laissant en mode « boudin » le couple à ma droite, qui venait de Québec.  

Avec une visite dans le catalogue du groupe, j’ai pu me délecter face à des pièces moins connues de ma part comme Mortal Share et The Gale, en plus d’avoir des pièces que j’ai pu reconnaitre comme Heart Like a Grave en rappel avec The Primeval Dark. Tout au long de cette prestation de metal assombri d’Insomnium, l’intensité dans la foule prenait de l’expansion et les surfeurs de foule se voulaient plus nombreux. Par contre, Vanhala et Cordle semblent avoir plus de retenue avec Insomnium qu’avec Omnium Gatherum.

Comme je le disais précédemment, l’album Anno 1696 demeure ma référence de la part d’Insomnium. Lorsque j’ai entendu White Christ, ma soirée se voulait complète dans le sens que cette chanson demeure celle qui m’a fait apprécier le groupe. Album sombre qui parle de la grande famine qui a sévi dans le nord de la Scandinavie à l’époque, j’ai totalement été soufflé par cet album et le livret qui vient avec. D’entendre en plus Lilian, Song of the Dusk et The Rapids, cela se voulait nettement suffisant pour ma part. D’avoir pu entendre le reste des pièces, l’effet épastrouillant mais tout de même contrôlé des musiciens avec leur enthousiasme fait que j’ai passé une soirée excessivement égayante.

Ce retour face à une écriture au niveau des soirées métalliques de la veille me permet de revisiter un truc que j’ai boudé pendant tout près de deux ans. Est-ce un retour pour moi envers ce type de communication?

Le futur nous le dira!

Toutes les photos : Martin Desbois de Ondes Chocs