Image ci-haut : Les brasseurs de Mellön et de Tête d’Allumette en plein brassin collaboratif, dont le résultat est une Lager de riz. Tête d’Allumette a d’ailleurs réalisé plusieurs bières collaboratives cet été pour souligner ses 10 ans d’activité.

Source de l’image : https://www.facebook.com/TetedAllumette/posts/632662275640996


Introduction

Le milieu de la bière québécoise est souvent reconnu pour ses valeurs d’entraide et de collaboration. Une certaine camaraderie règne entre les brasseurs, qui partagent une expérience commune qui est leur passion pour la bière, devenue leur gagne-pain.

Dans les dernières décennies au Québec, on voit apparaître sporadiquement des bières collaboratives entre microbrasseries. L’une de celle qui m’a beaucoup marquée personnellement, en 2014, est la 30¢, une Black IPA collaborative entre le Castor et Pit Caribou. Une bière avait été réalisée chez chacune des brasseries selon la même recette, ce qui permettait d’observer les différences et les impacts que pouvaient apporter des éléments comme le système de brassage ou encore l’eau utilisée chez deux brasseries différentes. Les deux bières possédaient effectivement quelques subtiles différences lorsqu’on les dégustait côte à côte.

Source de l’image : L’amateur de bière.com


On entend aussi des situations dans lesquelles un brasseur expérimenté d’une brasserie bien établie viendra en aide à un nouveau venu, que ce soit au niveau de ses recettes, son adaptation au système de brassage industriel ou encore à sa gestion de l’entreprise.

Sans m’appuyer sur des statistiques ou observations, j’ai tout de même l’impression que ce phénomène est moins visible dernièrement, dans un contexte plus compétitif que jamais, dans lequel on assiste à une prolifération des microbrasseries et à une guerre pour l’espace tablette limité. Il restera en revanche toujours une poignée de passionnés qui seront là pour les bonnes raisons et qui apprécieront partager leurs connaissances et l’expérience commune du brassage, voire une réelle amitié qui s’est bâtie au fil des années.

Avec les bières collaboratives, au niveau gustatif, on a parfois droit au meilleur comme au pire des microbrasseries impliquées. Deux excellentes microbrasseries peuvent autant pondre une bière plus qu’ordinaire ou bien un chef-d’œuvre. On pourrait parfois penser qu’il s’agit d’un coup marketing également ; on vient apposer le nom d’une microbrasserie renommée sur son étiquette pour faire vendre. Cependant, toute microbrasserie renommée qui se respecte justement, n’aura pas intérêt à accoler son nom à n’importe quel produit et devrait normalement s’associer à d’autres brasseurs qu’ils considèrent au moins aussi passionnés et talentueux.

Les collaborations ne sont donc pas nécessairement toujours gage de qualité, mais elles immortalisent (le temps que le brassin soit écoulé du moins!) un moment de camaraderie entre passionnés, amis et membres d’une même industrie.


Trois bières collaboratives à essayer en ce moment


Spaghat – Pilsner italienne – 4,9% – Nano Cinco et Jackalhop (Québec et Plessisville)

Une Pilsner dite « italienne » désigne habituellement une Pilsner houblonnée à froid à l’aide d’un houblon allemand, ou européen de manière plus générale. Avec la Spaghat, on a par contre plutôt droit à un dry hop de Riwaka, un houblon d’origine néo-zélandaise. Celui-ci se distingue par ses arômes floraux, de fruits de la passion, de pamplemousses ou de citrons. On conserve tout de même la base céréalière, « clean » et sèche des Pilsners, ce qui en fait une bière bien rafraîchissante!


Polyphonique – Grisette barriquée – 4,8% – Tête d’Allumette et Auval (Saint-André-de-Kamouraska et Val-d’Espoir)

Avec cette Grisette qui a passé un certain temps en barriques, on peut retrouver des saveurs céréalières, rustiques, légèrement épicées et boisées. Quelques notes fruitées, de citron ou de pomme verte, sont aussi détectées. La finale est un peu acidulée, vineuse, tannique et sèche, mais jamais trop puissante. Malgré le type de saveurs retrouvé, on fait surtout ici dans la délicatesse, l’élégance, l’équilibre et la bonne « buvabilité », chose qui est d’ailleurs souvent mise de l’avant par les deux microbrasseries impliquées.


Exploration cosmique – Double IPA – 8% – Noctem et EXP Artisan Brasseur (toutes deux de Québec)

Comme c’est souvent le cas avec les IPA de Noctem, on a droit à quelque chose de très aromatique sans que l’on soit à 100% sur le style NEIPA. C’est en effet généralement un peu plus amer et la texture est huileuse plutôt que vraiment onctueuse. Cette Exploration cosmique, houblonnée au Nelson Sauvin, Idaho 7 et Idaho 7 cryo, nous propose entre autres des arômes d’ananas, de cantaloups, de nectarines et de zestes de pamplemousses. Si vous appréciez habituellement les Double IPA de Noctem, celle-ci avec EXP, devrait certainement vous plaire!


Conclusion

Tel que discuté précédemment dans cet article, bien que les collaborations ne soient pas toujours gage de bières exceptionnelles, je trouve souvent intéressant de voir de quelle façon deux microbrasseries vont travailler différents styles de bières d’une façon commune. À l’issu de cet exercice, chaque brasseur repart de son côté avec de nouvelles connaissances, idées ou techniques, qu’il pourra à son tour mettre à profit avec ses futures bières.

L’entraide, que l’on semble perdre (ou du moins un peu moins voir) dans les dernières années avec l’arrivée et l’expansion de microbrasseries qui visent à avoir les plus grandes parts de marché possible, demeure à mon avis l’un des éléments les plus intéressants du milieu brassicole québécois, et en est certainement un qui a contribué à son essor dans les dernières années.

Pour plus de suggestions de bières de microbrasserie à essayer, visitez L’amateur de bière.com.