J’ai connu Maudiir après qu’un ami m’ait envoyé un lien bandcamp. Après écoute du mini-album intitulé Le temps peste paru début 2020, j’ai voulu en savoir davantage sur le projet. J’ai demandé à Fred Bergeron, l’homme derrière le groupe montréalais, de venir en entrevue pour l’épisode 153 d’Ars Macabra, offre qu’il a acceptée. Dans cet entretien, il nous avait notamment mentionné travailler sur du nouveau matériel qu’il envisageait de sortir en 2021 sous la forme d’un mini-album. Je ne fus donc pas surpris d’apprendre que Maudiir doterait sa discographie dudit nouvel opus en date du 19 février prochain.

Cette parution s’intitule La part du Diable et totalise cinq titres originaux. D’un point de vue esthétique, on nous offre un emballage sobre où le logo du groupe figure sur une photo urbaine en noir et blanc. Étant né loin de Babylone, je n’ai pu m’empêcher de penser à la similitude de l’imagerie mise de l’avant avec Le temps peste, mais également avec L’entéléchie du malheur de la formation Précipices, aussi basée à Montréal. Néanmoins, si le cliché du nouveau mini-album fait un clin d’œil à la parution précédente, force est d’admettre que le son de Maudiir a mûri dans la dernière année.

Là où le thrash metal était perçu comme une influence sur le premier maxi, il fait définitivement parti des lignes maitresses qui guident le second effort. La production est propre et travaillée, les pièces sont plus rapides, plus agressives et les guitares ont plus de mordant. Des éléments typiques du sous-genre sont bien présents comme la feinte de finale, un cliché bien intégrée dans Fracture. Même chose pour les clichés avec le titre The Slumber où une première guitare dissonante et un pattern rythmique saccadé de la seconde sont appuyées par une basse enveloppante, le tout suivant une batterie qui se charge d’asseoir le tempo. Les riffs rythmés où le picking est à l’honneur sont en quantité et bien imbriqués aux motifs d’une seconde gratte qui emprunte une sonorité et un phrasé qui rappelle par moments le death metal mélodique de la vieille école.

Dans la continuité du premier effort, le son de basse est à point. Autant on entend la rondeur aux moments opportuns, autant elle peut vous claquer les oreilles avec vigueur comme en témoignent certains passages plus notables de Spirit of Sulfur ou The Fortunate Few. Toujours dans ce même état d’esprit, Maudiir saupoudre quelques « vers d’oreille » au gré des titres. Le traditionnel hook du refrain vient cimenter un point d’ancrage dans un environnement musical plutôt technique et complexe. On nous sert donc, à quelques occasions, ces passages où il fait bon de taper du pied en ponctuant de « oui-oui » de la tête. Cependant, La part du Diable demeure un opus qui met au premier plan une musique que je me permets de qualifier de cérébrale. Certes, nous ne sommes pas dans le rock progressif polyrythmique, mais il est clair que l’on entend cette autre influence du compositeur en cours d’écoute.

Les parties de batteries sont intéressantes et appuient bien le jeu des guitares, mais c’est probablement le maillon faible du mini-album. Je dois ajouter ici que j’ai une relation amour/haine avec les boites à rythmes alors ce n’est pas la partition que je critique ici, mais plutôt le son synthétique, froid et non organique. Je suis conscient que la démocratisation de cette technologie sert à bien des égards et permet une autonomie plus que nécessaire face à une réalité où rares sont les batteurs disponibles, encore plus les excellents batteurs. Dans le contexte, c’est un choix qui se défend et que je comprends très bien. Néanmoins, plus j’écoute La part du Diable, plus je me dis que tel ou tel passage sonnerait davantage avec une vraie batterie et un son organique, notamment les parties ponctuées de blastbeats, dans la veine typée du black metal. Les coups toujours scrupuleusement égaux et précis enlèvent la possibilité de nuances ou d’accents qu’un humain peut ajouter à sa dynamique pour ces moments clés, notamment avec l’utilisation des cymbales. Quoi qu’il en soit, ce n’est pas quelque chose qui vient ruiner la production, mais bien plus une question d’appréciation personnelle. Nul doute que certains auditeurs moins portés sur les subtilités du studio n’y verront que du feu et grand bien leur fasse…

En définitive, le fait d’avoir haussé l’intensité d’un cran combiné au choix de miser sur un son thrash metal plus assumé sont, à mon humble avis, les principaux ajouts à la recette de Maudiir. Ceux qui auront apprécié la première parution ne seront pas en terrain inconnu, mais en découvriront une nouvelle facette. Avec ce dynamisme renouvelé et une agressivité sonore davantage imposée, tous les éléments sont en place pour que le projet montréalais joigne un large public.

La part du Diable sera disponible dès le 19 février 2021.

https://maudiir.bandcamp.com/