Les deux frères, Max et Iggor Cavalera, ont décidé de s’attaquer au catalogue de leur ancien groupe, Sepultura. Dans un premier temps, nous avons eu droit aux réenregistrements de Morbid Visions et Bestial Devastation. Pour 2024, c’est Schizophrenia qui reçoit une cure de jouvence de la part des frangins. « Si ce n’est pas brisé, pourquoi le réparer? » disait l’adage populaire, mais en même temps, connaissant le climat qui existe entre le camp des deux frères avec celui d’Andreas Kisser/Paulo Jr et la tension qui vient avec, on comprend mieux le pourquoi de la chose!

Les Cavalera veulent se réapproprier les choses, ce qui leur a permis de se faire un nom à l’époque. Avec le retrait de Sepultura, j’ai comme l’impression que les frangins risquent de rouler amplement sur le stock antique et de reprendre le trône des Rois du Metal au Brésil. Réenregistrements ou non, ils sont toujours en tournée pour proposer un projet ou un autre et de pouvoir rouler sur le vieux stock se veut un avantage métallique d’envergure pour les amateurs des premiers albums.

Par contre, ils ne viennent pas souvent dans le coin. Gloria Cavalera m’a déjà expliqué qu’un membre du groupe ne passe pas les douanes canadiennes, ce qui empêche Max de venir aussi souvent qu’il le souhaiterait.

Et Max Cavalera, c’est un musicien que j’apprécie, que nous apprécions. Il a toujours représenté l’intégrité en tant que tel et le souci de nourrir la scène métallique en soutenant les nouveaux groupes tout en gardant les racines bien humidifiées avec quelques-uns de ses projets.

En ce qui concerne Iggor, lui aussi demeure un musicien fortement respecté quoiqu’avec lui, on sent qu’il adore toucher à des dimensions plus éclectiques, notamment avec son projet Absent in Body et aussi, avec Petbrick.    

Côté incorruptibilité, les frères demeurent des références. Lorsqu’ils ont enligné Cavalera Conspiracy, nous pouvions sentir que le côté malin était toujours présent en eux. Ceci se voulait une satisfaction face au côté tribal de Soulfly, dimension musicale qui en irrite plus d’un. Avec des tournées où les frères proposaient des albums de Sepultura au complet tandis que le Sepultura de Kisser tournait aussi en parallèle, on sentait que les deux formations avaient le couteau entre les dents!   

Quand les frères Cavalera ont sorti leurs versions de Bestial Devastation et Morbid Visions, j’ai jeté une oreille mais sans tomber de mon tabouret. À l’époque, j’ai découvert Sepultura avec Beneath the Remains et par la suite, j’ai découvert le catalogue en rétrogression. Les deux premiers enregistrements se voulaient corrects pour mon oreille mais c’est vraiment avec Schizophrenia que je trouvais un Sepultura qui me plaisait. Plus brut que sur Beneath the Remains, c’est certain mais plus serré au niveau musical que sur Morbid Visions.

Cette nouvelle version de Schizophrenia, je l’attendais avec enthousiasme et je dois avouer que je ne suis pas déçu. Le respect de la vieille école est présent sur cette production moderne, la voix de Max contient une surdose d’écho, nous donnant cette sensation sonore que la voix vient du fin fond d’une caverne de la Chapada. Les percussions sont très fortes dans le mix et Iggor utilise une bonne quantité de rototoms, comme dans le temps. Tout est plus gras que sur l’original, mais tout est plus épicé, aussi.

Les guitares sont émoussées et la basse, bien présente aussi, ce qui donne un habile mélange qui va plaire autant aux mateurs de la première heure autant qu’à ceux qui veulent tomber en mode découverte face au passé de Sepultura, le Sepultura d’origine    

En faisant l’écoute pour une première fois de cette nouvelle mouture, je me suis rendu compte à quel point des formations comme Power Trip, Enforced et Toxic Holocaust avaient pu être influencé directement par cet album, étant donné son côté incisif mais excessivement accrocheur. Avec mes écoutes, je me suis rappelé que les trois premières chansons de l’album, From the Past Comes the Storms, To the Wall et Escape to the Void sont trois immenses canons. Les deux premières se sont pratiquement diluées, disparaissant des concerts de Sepultura et de tout ce qui concerne les frères. Par contre, Escape to the Void demeure l’un des morceaux les plus puissants des Brésiliens.  

L’approche est brutale sur cet enregistrement, c’est hargneux tout au long et lorsque les frères y vont avec Inquisition Symphony, ce qui se veut leur Call of Ktulu, ils gardent la même ligne. On ressent que même sur celle-ci, l’intensité est toujours palpable et que les frères ont cette rage au bout des doigts, le tout canalisé par leurs mains puissantes, en plus de celles de Igor (fils de Max) à la basse et Travis Stone de Pig Destroyer/Noisem sur l’autre guitare.

Le reste de l’album est interprété parfaitement, confirmant que R.I.P (Rest in Pain) est aussi un morceau très opulent qui est aussi tombé dans le caniveau, avec les années. En guise de finale, les frères Cavalera proposent Nightmares of Delirium qui se veut, une nouvelle chanson. Chanson qui colle bien avec le reste de l’album, je dois avouer que j’aurais repris Troops of Doom, étant donné que de mon côté, ma version de Schizophrenia est celle de Roadracer Records et proposait cette pièce réenregistrée en 1990.

Nouvelle couverte d’Eliran Kantor, qui se veut une interprétation actuelle de la précédente et originale, en plus d’une production excessivement musclée d’Arthur Rizk, cette version de Schizophrenia tombe à point pour l’amateur qui a probablement fait son achat de billet face à l’arrêt final de Sepultura à Montréal mais en souhaitant vivement un retour des Cavalera dans la province, d’ici quelques mois!

Disponible le 21 juin sur Nuclear Blast Records.

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Photo : Kevin Estrada