À la base, je voulais débuter cet article en parlant de politique. Surtout la politique américaine et ses immenses frasques qui surviennent au quotidien. Sauf que, de jour en jour, c’est du pareil au même. Et je ne dis pas cela pour banaliser, car en réalité c’est un brin effrayant de savoir tout ce qui se passe là-bas. Il serait facile de ne parler que de mon point de vue de gars qui habite au Québec mais j’ai quelques amis américains et je vous le confirme, ils ne se sentent aucunement bien face à la situation actuelle. Ils ont honte, ils sentent être la risée de la planète. Rien de moins…
Ce sont des amis du domaine musical, en plus du domaine du journalisme métallique, aussi. Je fais ce « métier » depuis plus de 20 ans, j’ai donc pu tisser des liens avec le temps. Des gens d’ici, d’Europe et des États-Unis. En même temps, le monde métallique se fout de la politique en théorie mais lorsque c’est aussi fédérateur et irréel que ce qui se passe en ce moment, nous n’avons pas le choix de nous arrêter et de nous dire : « Ouais, c’est là qu’on est rendu… »
Période totalement déjantée, éclatée et remplie de moments inattendus, c’est ce que nous vivons présentement. Il serait difficile de prévoir quoique ce soit au sud de la frontière car à chaque jour suffit sa peine. Il serait plutôt difficile de se créer une trame sonore face à toute l’agitation politique. C’est certain que le président orangé irait avec Kid Rock et Village People mais il manque de discordance, de cassures sonores et d’imprévisibilités dans ce qui se retrouve dans les oreilles du Donald.
Arrive le nouvel album de Vildhjarta. Groupe totalement inclassable, leur musique est difficilement catégorisable et peut se vivre comme un malaise auditif, pour plusieurs. J’ai même eu une certaine réticence de vous en parler car en mode écoute, c’est pratiquement anxiogène. C’est le genre de groupe que je m’attendrais de voir beaucoup plus au Festival des Musiques Actuelles de Victoriaville plutôt que sur une tournée métallique, comme celle de Dying Fetus et Cradle of Filth.
Discordante et répétitive, il faut quelques écoutes pour s’y faire en ce qui concerne cet album au nom étrange qu’est + där skogen sjunger under evighetens granar +, qui voudrait dire « où la forêt chante sous les sapins éternels ». Nous sommes en mode metal progressif mais avec une touche bizarroïde et plutôt déstabilisante. Avec quelques notes angoissantes, l’album s’ouvre avec le morceau + byta ut alla stjärnor på himlen mot plustecken +. Si tu es seul(e) dans ta tente lors de l’écoute, tu risques d’avoir la pétoche.

Les notes à la guitare qui suivent sont discordantes. Le fond sonore demeure encore sous la thématique angoissante. Les percussions sont saccadées, la basse suit le roulement et si tu crois que Meshuggah est un groupe éclaté, Vildhjarta vient brouiller tes cartes. Les musiciens nous gardent sous ce dôme anxiogène et musicalement, c’est répétitif. Lors de ton écoute, tu suis la ligne imposée par cette formation totalement imprévisible.
Le morceau suivant qu’est + två vackra svanar + propose une voix de type death métallique lors des premiers souffles. Après les quelques grognements, nous retrouvons le côté planant qui se verse dans les lignes de guitares qui nous martèlent depuis le début de l’aventure. Si la météo maussade des derniers jours est un truc qui te tape au niveau du moral, l’écoute de cet album ne risque aucunement de te remettre un sourire au visage…
La nature angoissante de l’album se continue avec + sargasso + où nous retrouvons une attaque vocale encore plus acidulée. Toujours en mode déconstruction, tout est encore démonté musicalement pour être encore plus remonté par la suite dans des enchainements déstabilisants.
À date, c’est une véritable expérience musicale, une qui se veut viscérale. Vildhjarta a cette capacité d’attaquer avec des impulsions sonores vigoureuses pour ensuite te plonger dans un bassin d’angoisse musicale. Ça parait négatif lorsque je vous le décris mais si le moral est bon, votre expérience sonore pourrait vous satisfaire si vous avez l’horizon musical en mode ouverture… béante!
La pièce qu’est + ylva + est plus apocalyptique, + där mossan möter havet + reprend en mode destructif en plus d’offrir une ligne vocale plus participative qui rappelle Orbit Culture et + röda läppar, söta äpplen + est, comme nous devons nous y attendre, oppressante. En toute honnêteté, c’est ainsi jusqu’à la toute fin de cet album.
Effectivement, + där skogen sjunger under evighetens granar + n’est pas un album conventionnel. C’est une expérience sonore, avant tout car ce disque n’est pas une partie de plaisir, et n’est pas un fond musical d’ambiance participative. Non. L’écoute de cet album est plutôt comme un voyage dans l’esprit d’une personne qui souffrirait de schizophrénie, par exemple…
Vous êtes avisés!
Disponible le 30 mai sur Century Media Records.
www.facebook.com/vildhjartaofficial
Photo : Glenn Lindberg